• Jacques Chirac est mort à l'âge de 86 ans

     

    Jacques Chirac, le 5 mai 2006 à l\'Elysée, à Paris.

     

    Jacques Chirac est mort à l'âge de 86 ans

     

    Jacques Chirac est mort. Sa famille l'a annoncé, jeudi 26 septembre, à l'AFP. "Le président Jacques Chirac s'est éteint ce matin au milieu des siens. Paisiblement", a déclaré son gendre Frédéric Salat-Baroux, époux de Claude Chirac. Sa santé s'était dégradée depuis son départ de l'Elysée en 2007, conséquence notamment d'un accident vasculaire cérébral survenu en 2005, durant son second mandat de président de la République. En septembre 2016, il avait dû rentrer en urgence du Maroc, où il était en villégiature avec son épouse Bernadette, afin d'être hospitalisé à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris pour une infection pulmonaire. Il y avait séjourné pendant près d'un mois, avant de pouvoir regagner son domicile parisien.

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    Une dernière apparition en novembre 2014

    Réputé pendant des décennies pour sa santé de fer et son naturel bon vivant, Jacques Chirac avait connu plusieurs alertes, à tel point qu'en janvier 2014, Bernadette Chirac avait estimé que son époux ne parlerait plus en public et évoqué des troubles de "sa mémoire, surtout par moments".

    La dernière apparition de l'ancien chef d'Etat à une cérémonie officielle remonte au 21 novembre 2014. Diminué, la main sur l'épaule de son épouse, il était arrivé sous les applaudissements de la salle. L'absence médiatique qui a suivi est d'autant plus marquante que Jacques Chirac a été omniprésent dans la vie politique française pendant près de cinquante ans.

    Des débuts marqués à gauche en politique 

    Paradoxalement, c'est à gauche que le jeune Jacques Chirac, devenu ensuite une figure emblématique de la droite, fait ses débuts en politique. Une fois son baccalauréat en poche, en 1951, il entame des études à l’Institut politique de Paris et adhère aux Etudiants socialistes, fasciné par Michel Rocard, de deux ans son aîné. Il s’engage ensuite un temps au PCF, et n'hésite pas à vendre L'Humanité rue de Vaugirard. "Epouvanté par le sectarisme de mes camarades, j'ai eu vite fait de m'éloigner d'eux", confie-t-il dans sa biographie, Chaque pas doit être un but (Nil, 2009).

    Pendant ses études, il rencontre Bernadette Chodron de Courcel et l’épouse en 1956. Il part ensuite faire son service militaire en Algérie et se bat pour éviter l’indépendance. "J’étais profondément Algérie française", explique-t-il dans ses Mémoires. Il est le seul énarque à refuser de signer la motion de soutien à De Gaulle, avant de plier au bout de 48 heures.

     

    Jacques Chirac et son épouse Bernadette voyagent à bord du train Tokaido, reliant Tokyo à Osaka (Japon), le 2 août 1976.

    Jacques Chirac et son épouse Bernadette voyagent à bord du train Tokaido, reliant Tokyo à Osaka (Japon), le 2 août 1976. (AFP)

     

    Jacques Chirac se lance finalement dans le grand bain de la politique au côté de Georges Pompidou, dont il devient le bras armé. Celui qui est à l'époque Premier ministre l’appelle son "bulldozer", comme le note L'Obs en 2009, dans un long portrait. En 1967, il est élu député en Corrèze, où sont nés ses parents. C'est un des "Jeunes loups" de Georges Pompidou : une armée de candidats prometteurs envoyés pour ravir les bastions de la gauche.

    Démission spectaculaire du poste de Premier ministre

    Jacques Chirac crée la surprise en 1974, en refusant de soutenir à la présidentielle le candidat de son parti, l'UDR, Jacques Chaban-Delmas. Il l'estime incapable de battre le candidat de la gauche François Mitterrand. Il s’engage auprès de Valéry Giscard d’Estaing. Redevable, ce dernier en fait son Premier ministre après sa victoire à la présidentielle en 1974. Mais Jacques Chirac finit par claquer la porte deux ans plus tard.

    Je ne dispose pas des moyens que j'estime nécessaires pour assumer efficacement les fonctions de Premier ministre et, dans ces conditions, j'ai décidé d'y mettre fin.Jacques Chiracen 1976

    C’est la première fois qu'un Premier ministre démissionne. D'habitude, c'est le président qui met fin à ses fonctions. La conclusion de deux années de tensions avec Valéry Giscard d’Estaing, qui le soupçonne de vouloir prendre sa place.

    Il a raison. Après avoir fondé le RPR en décembre 1976, Jacques Chirac se présente à la présidence de la République en 1981. Ecarté au premier tour, il affirme qu’il donnera sa voix, à titre personnel, à celui qui était son ancien président. Mais en sous-main, il pousse ceux qui le soutiennent à voter pour François Mitterrand, estime Valéry Giscard d’Estaing. Dans ses Mémoires, citées par Libération, le président sortant affirme avoir appelé, lors de la campagne, la permanence de Jacques Chirac, qui lui avait conseillé de voter pour François Mitterrand.

    L'obsession présidentielle

    A la tête de la principale force d’opposition face au gouvernement socialiste, il remporte avec le RPR les législatives de 1986 et devient Premier ministre. C’est la première cohabitation de l'histoire de la Ve République. Avec l’aide de son ministre des Finances, Edouard Balladur, Jacques Chirac applique une politique très libérale dans une ambiance délétère avec le président François Mitterrand. Echaudé par cette expérience, il se présente une nouvelle fois à la tête de l'Etat en 1988, mais échoue lourdement au second tour face au chef de l'Etat sortant : il ne récolte que 45,98% des voix. Son ancien camarade de Sciences-Po, Michel Rocard, prend sa place à Matignon.

    Jacques Chirac reprend son siège de député corrézien et est réélu triomphalement maire de Paris en 1989. En plein contexte de percée du Front national, il crée une polémique nationale en parlant des difficultés du "travailleur français qui habite à la Goutte d'Or" excédé par "le bruit et l’odeur" de ses voisins africains. Malgré le scandale, Jacques Chirac continue sa route avec un seul objectif en tête : la présidence de la République.

    C’est pour cela qu’il refuse d’être Premier ministre en 1993, après la victoire de la droite aux législatives. Il laisse la place à Edouard Balladur, son "ami de trente ans", qu'il souhaite installer à Matignon, en cas de victoire à la présidentielle. Mais ce dernier a d’autres ambitions. 

    Jacques… Ne vous y trompez pas. Je ne serai jamais votre Premier ministre.Edouard Balladuren septembre 1993

    Les deux hommes se présentent à la présidentielle de 1995 et la droite entre en guerre civile. Mais Jacques Chirac bat Edouard Balladur au premier tour, à 20,84% contre 18,58%. Au second tour, il remporte sa place à l’Elysée face à Lionel Jospin.

    Un discours historique sur la déportation des juifs

    Doté d'une énergie hors norme quand il se lance à la conquête du pouvoir, Jacques Chirac a pu décevoir quand il s'est agi de l'exercer. S'il y a bien un domaine dans lequel son action ne souffre pas de critique, c'est le travail de mémoire qu'il entreprend en tant que président.

     

    Jacques Chirac salue la foule depuis le balcon de la permanence électorale du RPR, le 7 mai 1995, après son élection. 

    Jacques Chirac salue la foule depuis le balcon de la permanence électorale du RPR, le 7 mai 1995, après son élection.  (PIERRE BOUSSEL / AFP)

     

    Deux mois à peine après sa prise de fonctions, Jacques Chirac réécrit l'histoire de France : il reconnaît la responsabilité de l'Etat français dans la déportation des juifs pendant l'Occupation. "Ces heures noires souillent à jamais notre histoire et sont une injure à notre passé et à nos traditions. Oui, la folie criminelle de l'occupant a été, chacun le sait, secondée par des Français, secondée par l'Etat français". Prononcé à l'occasion de la commémoration de la rafle du Vel d'Hiv, le 16 juillet 1995, ce discours marque une rupture avec les années Mitterrand.

    Elu sur la promesse de réduire la fracture sociale, Jacques Chirac met en œuvre dès l'automne des réformes à rebours de ce thème de campagne. Alain Juppé, Premier ministre "droit dans ses bottes", veut réformer en profondeur la sécurité sociale et les retraites. Son plan déclenche des grèves massives dans le privé, la fonction publique et surtout la SNCF, paralysant le pays de la mi-octobre à la fin novembre. Le 12 décembre, deux millions de personnes défilent dans les rues. Trois jours plus tard, le gouvernement retire sa réforme des retraites. Premier recul de Jacques Chirac devant la rue. La popularité de son gouvernement ne s'en remettra pas.

    Dissolution surprise et succès face à Le Pen

    Deux ans plus tard, le président fait un coup que personne, y compris dans son camp, ne comprend : la dissolution de l'Assemblée nationale. Censée relégitimer son pouvoir, elle aboutit, au contraire, à la victoire de la gauche aux législatives. Lionel Jospin fait son entrée à Matignon et Jacques Chirac est coincé pour cinq années de cohabitation.

     

    Le Premier ministre Lionel Jospin, en pleine discussion avec Jacques Chirac, camoufle le microphone, le 8 décembre 2000, lors d\'un sommet européen à Nice.  

    Le Premier ministre Lionel Jospin, en pleine discussion avec Jacques Chirac, camoufle le microphone, le 8 décembre 2000, lors d'un sommet européen à Nice.   (GEORGES GOBET / AFP)

     

    Il peut quand même mener la réforme du mandat présidentiel, qui passe du septennat au quinquennat. Une réforme si consensuelle qu'elle n'intéresse pas les Francais, sollicités sur cette question lors d'un référendum : 70% ne se déplacent pas pour voter. Il lance aussi la professionnalisation de l'armée, avec son très populaire corollaire : l'abandon du service militaire. 

    Malgré ce bilan très mince, Jacques Chirac parvient à se faire réélire en 2002. Mais dans un contexte très particulier. Au soir du premier tour, ce 21 avril, c'est Jean-Marie Le Pen qui se qualifie au second tour face au président sortant. Lionel Jospin est éliminé. Jacques Chirac se pose alors en rempart contre le FN, et remporte l'élection avec plus de 82% des suffrages. Malgré de nombreux appels, Jacques Chirac ne profite pas de ce score pour mettre en place un gouvernement d'union nationale.

    Un second mandat marqué par l'immobilisme

    Principal marqueur de ce second mandat : le refus d'engager la France dans la guerre en Irak. C'est le célèbre discours prononcé par Dominique de Villepin, à l'ONU le 14 février 2003. L'éloquence du ministre des Affaires étrangères est saluée par des applaudissements, particulièrement rares dans cette enceinte. Avec cette prise de position, Jacques Chirac redonne à la France une certaine visibilité à l'international. Le président va d'ailleurs, tout au long de ce second mandat, endosser un nouveau costume sur la scène mondiale : converti à l'écologie par Nicolas Hulot, tiers-mondiste, promoteur de la taxe Tobin, il devient presque le champion des altermondialistes... 

    Mais sur le plan intérieur, c'est une autre histoire. Dans une logique gaullienne, Jacques Chirac organise, en 2005, un référendum sur la Constitution européenne. Des altermondialistes aux souverainistes, en passant par certains socialistes, la coalition du "non" est large. La campagne, qui se cristallise sur le "plombier polonais", aboutit sur un franc rejet, à plus de 54%. Un double échec, sur le plan européen mais aussi personnel pour Jacques Chirac.

     

    Jacques Chirac quitte l\'Elysée, le 16 mai 2007, après deux mandats à la tête du pays. Il laisse la place à Nicolas Sarkozy.

    Jacques Chirac quitte l'Elysée, le 16 mai 2007, après deux mandats à la tête du pays. Il laisse la place à Nicolas Sarkozy. (PATRICK KOVARIK / AFP)

     

    En janvier 2006, il doit affronter une nouvelle fois la rue, en particulier la jeunesse, vent debout contre le Contrat première embauche (CPE). Le dispositif, imaginé par Dominique de Villepin pour lutter contre le chômage des jeunes, est un contrat de travail réservé aux moins de 26 ans, qui peut être rompu sans motif pendant deux ans. Inacceptable pour les organisations de jeunesse, les syndicats et même une partie du patronat. La loi est votée, promulguée, mais ne sera jamais appliquée, nourrissant les critiques d'immobilisme à l'encontre du président.

    Jacques Chirac est aussi le premier président français à avoir été condamné par la justice, en 2011, dans l'affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris. Mais son nom a été mêlé à plusieurs affaires judiciaires, dans lesquelles il n'a pas été condamné, comme les marchés publics des lycées d'Ile-de-France ou les HLM de la Ville de Paris.

    Après l'élection de Nicolas Sarkozy à la présidentielle de 2007, il s'efface peu à peu du paysage politique en raison, notamment, de ses soucis de santé. Ce qui ne l'empêche pas, toutefois, de faire quelques sorties médiatiques remarquées, comme en 2011, où il apporte son soutien à François Hollande, alors en campagne pour la présidentielle face à Nicolas Sarkozy. Son dernier coup d'éclat politique. 

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